BERNARD MEULIEN
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Môssieu Meulien
! Si on m'avait dit qu'un jour je le mettrais sur Internet...
C'était dans les années 80, fin des années 70, au milieu de mes albums rock
que j'écoutais en boucle, Bernard Meulien faisait partie de mon exception
culturelle française. Car à l'époque, à part quelques Brassens, un peu de
Laffaille et quelques autres raretés, c'était le rock, les Genesis, Doors, Lou
Reed et autres anglophones bruyants.
Mais aussi - va savoir pourquoi ! - deux 33 tours, les deux premiers 33 tours de Gérard Pierron et, sur le premier, Bernard Meulien. Une émission de télé sur le monde paysan, un disquaire pas Cerbère mais bon conseiller qui me retrouve les albums des gars vus à la télé, une petite commande de deux volumes au Vent du Ch'min... et ces deux extra-rockers me tombent sur la tronche ! Les textes de Couté, les mélodies de Pierron, mais aussi cette voix qui parle dans un drôle de langage une langue qui me parle, un message qui me touche, une émotion qui m'émeut ! Des histoires de p'tits chats, d'odeur de fumier qui causent à mon côté rebelle...
Je me souviens - que Gérard Pierron me pardonne - qu'il m'arrivait de pousser le bras de l'électrophone pour me remettre l'Idylle des grands gâs. Les craquements sur mes vieux 33 tours viennent de là, c'est sûr.
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Et puis, un jour, au Limonaire, à Paris, l'occasion m'est donnée de les voir, les deux gars. Je m'en souviens, il y en a des traces là... J'applaudis comme un fou, je prends ma claque, la même que vingt avant. Et je repars dans ma province... |
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Et puis, un autre jour, 4 ans, plus tard Gérard Pierron et Bernard Meulien reviennent, à Reims, cette fois-ci, tout près de chez nous, au théâtre de l'Albatros. C'était là... et là j'ose aller les saluer ! |
Je me souviens aussi qu'à la fin du spectacle Bernard se promène parmi les spectateurs, répondant aux mots gentils des uns et des autres... et vendant son 33 tours ! On est en 2004...
On est en 2004 et Bernard Meulien vend des 33 tours : c'est le dernier !
Il faudra encore attendre près de 4 ans avant que le vieux loup de Monoblet sorte de sa tanière et nous fasse l'honneur d'un CD. Et, du coup, il en fera un double. Le premier, c'est l'enregistrement d'un de ses derniers spectacles, le second, c'est son album de souvenirs...
Et entre les deux rondelles, un joli livret oùsque le monsieur raconte "son" Couté, ses rencontres, sa vie d'artiste et de saltimbanque, ses souvenirs.
En voici quelques-uns
C'est
dans l'année 1971 que Vania Adriensens me fit découvrir Couté. |
J'allai
voir Gérard Pierron qui était tout près à Loches et lui proposai de
faire notre premier spectacle ensemble. Quelques temps après, remontant
à Paris en 2 CV on se dit : «Si on ramenait Couté à Montmartre ? »
Nous frappâmes au théâtre du Tertre, rue Lepic où nous passâmes une
audition. La directrice à la fin du Christ en bois nous dit
connaître ce texte car son père le disait aux banquets de mariage et
de communion. Elle nous embaucha pour une dizaine de jours et vu le succès
elle nous rappela pour un mois.
C'est à cette période que nous rencontrons Jean Claude Richard, Jean Pierre Gault, Lucien Séroux, Jean Jacques Cardona, Christian Porcher, Jean François Amary, Jules Fleureau. Nous créons l'association Le vent du chemin afin d'éditer l'oeuvre de Couté qui venait de tomber dans le domaine public. Il y aurait aussi de belles choses à raconter avec eux comme notre tournée en Beauce pour vendre le premier tome |
Madame
Breteaux, une femme charmante, était venue plusieurs soirs nous écouter
Vania et moi au Pétrin. Elle organisait une soirée à sa galerie de
peinture à Saint Germain des Prés. Elle invita une trentaine de
personnes dont Roger Monclin, écrivain antimilitariste et pacifiste. Je
retiens un regard un peu usé mais prolongé vers l'infini. A la fin du
spectacle nous échangeâmes quelques paroles, j'étais très ému. Il
nous remercia pour le spectacle. Je le remerciai pour son livre sur Couté.
A l'époque je l'avais, je ne l'ai plus à présent, l'ayant prêté ou
donné à quelqu'un, mais qui ?
Cela me fait penser qu'une fille sympa qui venait souvent au Pétrin
m'amena un soir le livre «La chanson d'un gâs qu'a mal tourné» édité
par Seghers. Elle l'avait discrètement chapardé dans une librairie de
province. Ce livre, je l'ai gardé longtemps, j'ai appris pas mal de
textes avec. Un matin très tôt à la gare de Lyon j'attendais le
premier train pour Marseille dans un bistrot. Un clodo s'approcha de moi
pour me vendre quelques bibelots qu'il avait fouinés dans les
poubelles. Nous prîmes le café ensemble. J'avais le bouquin sur la
table, je lui lu quelques poèmes. Il était fasciné. Je lui donnais le
livre en lui disant qu'il fallait lire les textes à haute voix. Il me
donna en échange une petite poupée aux bras cassés, ensuite je pris
le deuxième train pour Marseille. Cette année là (1976) le Vent du
chemin éditait le premier tome de «La chanson du gâs qu'a mal
tourné».
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Durant
quelque temps j'ai habité Beaugency, je logeais dans une petite chambre
qui donnait sur un grenier. Elle m'était prêtée par une de mes soeurs
qui habite Lestiou avec son compagnon (merci Popaule et Jean Paul). Je
tournais pas mal dans les villages de la région accompagné par Paul
André ou un dénommé Chat des bavards de godal. A l'occasion d'un
rendez-vous un après midi à Cléry Saint André pour voir la salle
communale, je passe par Meung pour emprunter le pont qui traverse
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A
Artenay par exemple où je joue un soir, accompagné à l'accordéon par
Angel Pino. A la fin du spectacle, un petit gâs de douze ou treize ans
achète le premier tome et le disque Alvarez (Pierron – Meulien). Il
me demande un autographe. Je lui rétorque que je ne suis pas Claude
François (quelque temps avant à Maze j'avais refusé à un gamin de
signer un disque; il était parti pleurer dans les jupons de sa mère et
je dus m'excuser avec tendresse). Ne voulant pas recommencer à faire
pleurer un môme, je lui mis un mot gentil en lui expliquant que je n'étais
qu'un simple interprète d'un grand auteur et que ma signature n'avait
aucune valeur, que j'étais contre ce genre de procédure. Il rentre
chez lui encore ébloui par les poèmes de la soirée qu'il retrouve
dans le livre, il écoute le disque et découvre les musiques de Gérard
avec guitare et accordéon. Il est à l'âge de sa communion. On veut
lui offrir une montre, il demande une guitare. Il tapote, grignote les
cordes avec ses doigts, il lui vient des petites mélodies. quelques
semaines plus tard il va avec des copains écouter Danièle Messia. Il
est sous le charme, à la fin du spectacle il va la voir. Il a sa
guitare avec lui (à treize ans on se sent troubadour). Ils passent plus
d'une heure ensemble. elle lui montre comment pincer les cordes, comment
on fait sonner les notes, lui apprend quelques accords. Des années
passent et voilà notre Bruno (c'est son prénom) qui décide de
fabriquer des guitares. Il est aujourd'hui un grand luthier sur Orléans. |