FESTIVAL DE ROUDON
Départ de Roudon

Nous partîmes une vingtaine de la turne de Roudon.
Tout le monde était là ; ne manquait que l' Gaston !
Le soleil, lui non plus, n'était pas d 'la partie,
Le plafond plutôt bas et le ciel plutôt gris.

N'avions pas fait cent mètres qu'un automobiliste,
Débouchant de nulle part, obstrua notre piste ;
L'ami Jacques l'incendia, le traitant d'écraseux !
I' fallut le r'tenir ! Voulait crever les pneus !

Jacques Lambour

Une fois passé le pont qui enjambe l'autoroute,
On vit là devant nous, un peu fanée sans doute,
L'immense silhouette du vieux moulin de Clan
Où vécut le Gaston quand il était enfant.

Devant la grande bâtisse le meunier attendait,
Portant sur ces braillards un regard fort inquiet.
Les Mauves roulaient leurs eaux dans ce si beau décor
Et Jackie nous conta l'histoire des moulins morts.

Le moulin de Clan

Et au milieu d' tout ça, y avait même FR3
Balayant le troupeau avec la caméra,
Ce troupeau de conscrits qu' auraient pas fait la guerre,
Ce troupeau de gueulards aux allures pas très claires...

A un chien qui hurlait de voir ce gai cortège
Vania, pour le calmer, fit sonner ses arpèges,
Entonnant à pleine voix la chanson des sans pain,
Ceux que chassent les chiens et que mordent les humains.

Vania Adrien Sens

Un kilomètre plus loin, arrivant sans effort
Dans ce havre de paix que nous prîmes pour un port,
Bons Gaulois, nous goûtâmes ce petit vin nouveau
Qu'avec amour Bernard conserve dans son bureau,

Ce bureau singulier peuplé de chauves-souris,
Et de toiles d'araignée qui veillent sur son p'tit gris.
Le corps à peine fourbu et la soif assouvie,
La troupe se leva, en marche se remit

Et transporta ses pas vers la vigne aux ceps noirs,
La dernière à pousser sur ces bords de la Loire.
Mais la pluie, elle aussi, s'associa au voyage
Et nous prit sans répit, nous noyant sans ménage

Bernard Gainier

Par les berges des Mauves nous revînmes à Roudon ;
Salade de pissenlit et chaude soupe à l'oignon
Nous réchauffèrent le corps, redonnèrent le courage,
La chaleur, le tonus pour monter à l'étage

Assister en direct, à l'abri des grêlons,
Au plus grand des plus grands festivals de Roudon.
Vania était assis, sa guitare devant lui,
L'ami Jean du P'tit Crème s'accorda avec lui ;

François se trouva deux casseroles en cuisine
Et s'en fit une batterie avec l'aide d'une bassine.
Alors tout bascula, la musique et les chants
Envahirent la mansarde de soleil et de vent.

Vania et François

L'ami Jacques se leva pour nous dire L'Enfermée
Et plus d'un dans la salle sentit ses yeux piquer.
Pour nous réconforter, Jackie nous raconta
L'histoire des Petits Chats : ce fut le calme plat.
Jacques Lambour

Alors François Robin souleva son chapeau
Pour une version plus rap d' la chanson des naviots.
Lunettes au bout du nez, Michel nous fit l'Ecole
Et un chant brésilien à la gloire du pétrole.

Francois RobinMichel Bediou

Assoupi dans son coin, surgit le trublion,
Le Couté des faubourgs ; j'ai nommé Mérillon.
Sa guitare érotique accordée sans oreille
Nous distilla z'alors quelques petit's merveilles,

Ses chansons mi-dialogues sur les joies des banlieues,
Les gros bateaux à voile et même le fils de Dieu,
Sur les grands d' la chanson en comptant Mérillon,
Sans oublier bien sûr l' festival de Roudon.

Délaissant l' sécateur, Bernard le vigneron,
Sur les traces de Dimey, fit la Crucifixion.
Quand il parle ce gars-là, on se demande parfois
Si il dit du Couté ou s'exprime en patois.

Jean-Claude Mérillon et Bernard Gainier

En première, ce soir-là, le P'tit Crème nous offrit,
Pour nous faire saliver, deux morceaux inédits,
Deux musiques toutes nouvelles pour nous faire mariner
Jusques à l'arrivée de leur petit dernier.

Jean et François du P'tit Crème

Il y en eut tant et tant que personne ne put
Garder en souvenir tout ce qu'on avait vu…
Le soleil sur les Mauves dormait depuis longtemps
Qu'il nous fallut partir, reprendre le volant,

Roudon dans la nuit
Quitter le vin d'Anjou, retraverser la France
Rebrousser le chemin, r'partir dans l'autre sens.
Pour ne pas s'endormir, on s'est mis à chanter
Du Dimey, Serizier et bien sûr du Couté,

Je les entends toujours, tous ces doux fous chantants,
Dont les chants retentirent par-delà les grands champs,
A travers la Beauce noire et ses champs de coton.
Rendez-vous l'an prochain pour le blues de Roudon !