JACKY FOUSSIER


Alors au câs ouq’ça vous dirait,
je sé là, tout près !


"Il était passé chez nous. Un soir, on frappe à la porte, c'était lui. Il avait notre adresse, il passait. On a mangé ensemble, on lui a proposé de dormir. Il a refusé, il avait sa roulotte garée dans le chemin près de la maison. Il a pris congé avant minuit. Et, le lendemain matin, quand on a remonté les volets pour l'inviter au café, la roulotte avait mis les bouts. C'est la dernière fois qu'on s'est vus. Salut, l'ami, cher oiseau de passage".
Christian





Jacky Foussier raconte et chante Gaston Couté, le poète paysan
    Dans la trace des sillons révoltés

A Parcé, dans une maison habitée d'histoires, Jacky Foussier, un enfant du pays, se plait à dire et redire les textes de Gaston Couté, le poète paysan du début du siècle qui l'a séduit. Emporté par le "message" de Couté, il se laisse tendrement accaparer par sa sensibilité. Rencontre.

    Il est du coin Jacky Foussier, de Parcé et après un séjour au Mans, il regagne sa commune. Agent de l'Éducation Nationale, il vit intensément les mouvances contestataires de 1968, allant de bistrots en rencontres, autour de la musique et de la poésie. "Je suis frustré de ne pas avoir fait d'études ", dévoile-t-il. Autodidacte, sans doute, impatient de savoir et de connaître, bien qu'il avoue “J'ai besoin de bouger, physiquement ; j'ai du mal à m'asseoir avec un bouquin “. Et pourtant, un ami lui offre, pas du tout banalement, un ouvrage de poèmes de Gaston Couté. Ce poète paysan de la Beauce, révolté et en souffrance, hurle les misères de ses frères, “les peineux, les outils de ceux qui ont les sous “. Et depuis quinze ans, l'histoire de Jacky et de Gaston perdure, un peu, comme qui dirait, la fidélité.

“J'écris sombre”

Il a la révolte tranquille des gens qui ne veulent pas devenir sages. Il aime les chansons à textes, tout le reste “nous débilise “. Il effleure les questions ou les esquive. Les personnelles, bien sûr. Alors, il se plait à raconter Gaston Coulé : “Couté c'est un message, son texte seul suffit. La musique n'est là que pour adoucir les paroles qui sont si souvent sulfureuses et agressives”. Si on y prête l'oreille, on l'entend, Jacky Foussier se raconter en Gaston Couté. Il répète les textes, encore et encore, “pas devant la glace, mois je laisse le geste arriver avec l'émotion. J'essaie de vivre le texte comme je le ressens”. Gaston Couté n'a jamais abandonné son patois, sa langue maternelle, ni son accent qui roule fort et haut. Et Jacky, quand il endosse l'habit “paysan” et qu'il pose son chapeau sur sa tète, on a l'impression que la rime surgit tout naturellement. Il se plaît à écrire Jacky Foussier, lui tout seul, des textes “sombres, pessimistes, avec tout ce que je n'aime pas”. Et puis, entre deux timbres un peu “sinistrose”, apparaissent quelques vers tendres qui parlent d'amour, de toujours et de liberté.

Offrir la poésie

    “J'ai aimé la révolte de Couté, ce qu'il écrit sur la campagne et la souffrance des gens de la campagne, contre le pouvoir de l'argent. En fait, rien n'a changé”.
    Tout démarre par un copain qui lui demande s'il a envie de faire quelque chose à la veillée de P.A.R.C.E.. Il lit Couté, les gens écoutent, attentifs. Et c'est le déclic. L'idée d'un spectacle fait son chemin. Il demande l'aide de Didier Bardoux, pour la mise en scène: Gérard Pierron lui prête ses musiques et Paul Robert l'accompagne à l'accordéon.
    Jacky Foussier a surtout très envie d'offrir de la poésie aux gens, avec des textes forts, qui cognent et ne s'adaptent pas.
 


“J'suis pas berlote, j'ai honte d' rester sans œuvrer”

 

   C'est par ces mots que Jacky Foussier termine son spectacle (…). C'est “l'enfermée” qui pleure: “Ouvrez-la moi la porte, j'suis pas berlote”. Elle, c'est la vieille, celle qui ne sortira bientôt plus que pour aller au cimetière. (…)

   Il raconte Gaston Couté en “le parlant” et en “le chantant”.

    “C'est un blanc ! c'est un rouge! qu'i's dis'nt les électeurs: les aveug'els chamaillent à propos des couleurs” ; “ah ! disez-donc, les villotlers, avec tous vos micmacs infâmes, ousque tremp'nt jusqu'aux culs d' vos femmes. l'sent p'tét' bon, vous, vout' feumier ?” ; “la mariée fait ronron, mais Pierre, son bousseux, se met en hargne... avec ses baisers qui sèchent sur ses lèvres, elle est esclave de la terre jalouse qui lui vole sa première nuit d'amour”...

    Et c'est ainsi, au gré des Poèmes que Gaston Couté, bardé de souffrances et de révoltes, hurle, par la voix de Jacky Foussier.

    Il mourra à 31ans, honoré par les siens, et laisse 250 poèmes et chansons. (…)Entre deux poèmes et deux chansons, Jacky Foussier, métamorphosé en paysan contestataire et délicieusement tendre, raconte la vie de Coulé, “les moments forts de sa vie, pour restituer l'homme au regard de ses  écrits”.